Le refus de coopération et collaboration de la part d’un collègue

Résumé

Malgré de régulières relances au cours de l’année un enseignant agrég refuse de mettre en place les différentes démarches pédagogiques de coopération avec sa collègue stagiaire qui tente de comprendre son refus et d’y remédier.

1. La situation

La situation se déroule dans un lycée technologique et professionnel (Lycée polyvalent) où évoluent 1000 élèves de seconde professionnelle en passant par le certificat d’aptitude professionnel jusqu’au Brevet de Technicien Supérieur.

Le mardi 12 octobre à 10h00 en salle des professeurs, tout juste avant la récréation, une enseignante stagiaire de Sciences et Techniques Médico-Sociales, une femme de 25 ans, aborde un de ses collègues, un professeur agrégé de la même discipline, un homme de 50 ans présent depuis vingt ans dans cet établissement de Seine-et-Marne. Ces deux professeurs évoluent dans une équipe pédagogique de cent professeurs. Ils partagent une classe de première de 24 élèves composée de 21 filles et de 3 garçons au comportement calme, ayant un niveau correct et une bonne progression mais nécessitant d’être encadré, soutenue voir même “infantilisé”. C’est afin de leurs proposer une continuité pédagogique et mettre en place un cadre qui les rassure dans leurs besoins d’être “encadré et materné” que les collaborations entre enseignants sont essentielles et c’est là que prend cadre notre problématique.

Au début de l’année scolaire, les deux enseignants s’étaient mis d’accord pour collaborer durant l’année autour d’activités technologiques et d’évaluations communes pour créer un lien concret dans leurs enseignements. Le professeur agrégé enseigne le pôle méthodologique du programme à raison de quatre heures en demi-groupe par semaine, tandis que la professeure stagiaire enseigne le pôle thématique à raison de deux heures en classe entière et deux heures en demi-groupe. 

Suite à l’accord de collaboration convenu en début d’année, la professeure stagiaire décide de partager avec lui sa progression pour faciliter l’organisation des collaborations. Plusieurs approches et tentatives d’échange sont initiées par la stagiaire, mais il s’avère que plus l’année progresse, plus le professeur devient distant et, malgré différentes tentatives de sollicitation de sa collègue, ils ne parviennent plus à communiquer. Il n’y a aucun retour à ses mails et à chaque début de conversation le collègue esquive le sujet.

Lors d’un échange, en salle des professeurs, concernant ce travail de conjoint, ce professeur s’est exclamé ainsi :

“A vrai dire je m’en bats les couilles de cette collaboration”.

Initialement la professeur stagiaire voulait mettre en place cette collaboration dès le début de l’année mais à cause de cet échange infructueux il n’a pas pu être réalisé une cohésion dans la progression ni de projet en commun.

Malgré ce rejet déstabilisant et agressif, la professeure stagiaire a continué à le solliciter, pour le bien de ses élèves, pour la mise en œuvre d’une activité technologique qu’elle souhaitait co-construire avec lui et pour apporter de la cohérence dans leurs enseignements. A ce jour, la co-construction n’a toujours pas été possible.

2. Les questions que pose la situation 

Le problème principal du refus de collaboration et de coopération de cette situation engendre de nombreuses conséquences qui influent négativement sur différents niveaux et sur  plusieurs acteurs aux seins de l’environnement pédagogique. Les causes probables de cette situation sont nombreuses. Le schéma sous forme de carte mentale présenté ci-dessous propose une vision globale de la situation, des raisons et des conséquences.

Causes probables du problème :

Le manque d’intégration est la cause principale de cette situation. Elle peut venir être la conséquence de nombreux facteurs sociaux et fonctionnels.

En effet, d’un point de vue social, la condition du stagiaire au sein de l’établissement n’est pas évidente. Il est souvent considéré comme un élément de passage avec lequel il est inutile de construire des projets ou collaborer, et, parfois même, non considéré comme qualifié à son poste par ses collègues. Le stagiaire peut facilement subir un rejet de la part d’une partie de de l’équipe pédagogique. Ainsi, les remarques sur la disparition d’heures supplémentaires prises par le poste du stagiaire sont fréquentes.

Il est à prendre en compte que la majorité des stagiaires n’a pas ou peu d’expérience d’enseignements. Au lieu de déclencher aide et soutien de la part des membres de l’équipe pédagogique, ce manque d’expérience engendre souvent une mise à l’écart et un regard « supérieur » sur ses choix et actions.

Pour intensifier ce phénomène, plus de la moitié des stagiaires ont moins de 25 ans (calcul réalisé sur différents groupes de L’Inspé d’Antony). Ce choc générationnel entraînant des différences de vision de l’enseignement et du monde peut marquer des difficultés de création de lien avec des enseignants plus âgés.

On ne peut malheureusement pas écarter le fait que, dans la situation présente, le stagiaire est une femme et le professeur agrégé est un homme. Malgré les évolutions de mentalité, la différence de sexe peut, pour certain, être un facteur de difficulté dans la relation d’échange entre les collègues.

Il est toujours important de considérer qu’”un enseignant reste un être humain” avec ses défauts et parfois son manque d’éducation. A leur décharge, la difficulté du métier peut entraîner un repli sur soi qui après quelques années se traduit par une fermeture aux autres.

D’un point de vue fonctionnel, il est regrettable de voir que les emplois du temps ne comprennent pas d’échange prévu pour les enseignants afin d’harmoniser leurs progressions. Les titulaires font des réunions ou trouvent des moments en fin d’année pour créer des liens entre disciplines, mais un stagiaire découvrant son poste parfois en septembre n’a pas la possibilité d’anticiper cette harmonisation.

Beaucoup de collègues refusent de se réunir pour travailler en commun si ces heures ne sont pas payées (heures périphériques, heure supplémentaire).

Enfin, pour finir sur les causes probables, abordons ici les causes professionnelles, et tout d’abord l’élitisme fréquent dans l’Éducation Nationale. En effet, à tous niveaux hiérarchiques, les groupes sont clairement dissociés. Il en est de même dans le corps des enseignants entre “PLP et CAPET”, “Agrégé et non Agrégé”, “Titulaire et Stagiaire”, “Hors classe ou Échelon de débutant”. Cette différenciation est malheureusement un point difficile à surmonter pour le néo-enseignant non préparé à cette “guerre des castes”. Pour finir, abordons un tabou de l’éducation nationale, une des dérives issues des habitudes de l’enseignant en poste depuis longtemps qui est “le manque d’envie de modifier ses cours ou ses pratiques”. Nous connaissons tous ces collègues qui sortent chaque année les mêmes cours. Ces collègues sont hermétiques au changement et souvent fermés à la discussion et la remise en question. Il est difficile pour le stagiaire de venir apporter sa touche personnelle dans une progression globale ou des modifications aux des pratiques utilisées suite aux enseignements de l’Inspé.

Conséquences Probables:

Les nombreuses causes énumérées dans la section précédente entraînent un manque d’intégration de l’enseignant stagiaire.  Ce manque d’intégration, par « effet boule de neige », entraîne lui même des conséquences indésirables sur la pédagogie ou sur le stagiaire lui même.

Concernant la pédagogie, le manque d’échange et de communication entre les enseignants entraîne forcément des ruptures entre les matières. La pluridisciplinarité souhaitée par l’Éducation Nationale ne peut prendre forme sans échanges entre les enseignants de chaque matière. Cela peut engendrer un réel manque de lien nécessaire pour donner du sens à l’enseignement dispensé.

De plus, le manque d’interdisciplinarité et le manque de cohérence pédagogique est évident sans construction groupée. Les thématiques communes ne peuvent se rejoindre et la logique globale ne peut être pertinente.

Enfin, le manque de cohérence dans la pédagogie globale est ressentie par les élèves et nuit à leur travail et leur compréhension globale de leurs enseignements. Ce manque de communication entraîne des difficultés dans la mise en place d’actions et de séquences judicieuses et optimales.  

Dans cette situation, le stagiaire peut avoir l’impression de se sentir seul face aux collègues et à l’institution. Par manque de communication, une barrière peut se former autour de lui. Ce sentiment compliquera fortement son travail et fera de chaque problème, même minime, un obstacle complexe à franchir pour lui.

3. Dimension réglementaire

L’enseignement de chaque discipline s’inscrit dans le cadre de textes réglementaires tels que des décrets. Cette situation met en jeu des aspects réglementaires en allant à l’encontre de certains textes.

  • Les programmes des enseignements de spécialité de la classe de première de la série technologique ST2S sont définis par arrêtés du 17-1-2019 publiés au Bulletin Officiel (BO) spécial n° 1 du 22 janvier 2019. 
  • Le BO est complété par un document d’accompagnement pour mettre en œuvre de l’enseignement. Ces documents sont disponibles sur Eduscol, et abordent les attendus en termes de programme et d’application de l’enseignement.

Ces documents précisent que des liens entre les différents pôles (thématique et méthodologique) sont à réaliser pour développer une mobilisation cohérente et fluide des acquis. Dans notre situation, la construction d’un enseignement global de la discipline se retrouve affectée. 

Selon les deux documents, cette globalité s’inscrit dans la mise en œuvre d’activité technologique (AT). 

L’AT a pour but de faire le lien entre les deux pôles. Elle cherche à mobiliser les méthodes, outils et ressources, vues en pôles méthodologiques, et de les mettre en lien avec les notions théoriques vues durant le pôle thématique. Aborder cet enseignement de façon globale participe à développer et renforcer la compréhension des notions étudiées. Les bénéfices de la collaboration entre enseignants sont soulignés par l’Université Laval, à Québec, qui explique que cela est utile pour donner de la cohérence entre les enseignements mais est également enrichissant sur le plan personnel et professionnel.

De plus, selon la liste des compétences que les professeurs, professeurs documentalistes et conseillers principaux d’éducation doivent maîtriser pour l’exercice de leur métier 1Bulletin officiel du 25 juillet 2013, nous repérons des compétences liées à la coopération. Le professeur doit coopérer au sein d’une équipe et contribuer à l’action de la communauté éducative.

Ainsi les enseignements organisés autour d’une démarche d’équipé pédagogique avec un travail de collaboration est qualité de bonne pratique par l’Inspection générale de l’éducation nationale dans son rapport “Le recensement des bonnes pratiques pédagogiques dans l’enseignement professionnel” 2Rapport 2016-078, IGEN, Novembre 2016, https://cache.media.education.gouv.fr/file/2016/44/7/2016-078_Recensement_enseignement_professionnel_690447.pdf.

4. Ce qu’en disent des collègues

Nous avons interrogé nos cinq collègues respectifs, en essayant de diversifier les profils. Nous leur avons exposé la situation et nous leur avons demandé ce qu’ils en pensent.

Globalement, nos collègues ont tous été interpellés par cette situation qui les a surpris mais à la fois semble totalement envisageable. 4 collègues sur 5 nous ont partagé des expériences de difficultés de collaboration. La moitié des situations prennent place lors d’une co-animation d’un enseignement. Les autres situations relèvent de difficultés lors de l’élaboration d’une progression commune ou de devoir commun.

Une collègue contractuelle a pu nous raconter une situation vécue lors de sa première année de contractualisation. Son collègue, avec qui elle partageait une discipline, mettait peu d’entrain pour collaborer et l’aider. Cela l’avait beaucoup perturbée, elle qui était une ancienne cadre de santé et donc habituée à collaborer avec ses collègues.
Après plusieurs mois à essayer de le solliciter, elle nous raconte en avoir parlé au Directeur Délégué aux Formations professionnelles et technologiques (DDFPT), qui a servi d’intermédiaire. L’intervention du DDFPT a eu un léger impact durant les semaines qui ont suivi mais n’a pas fonctionné à long terme. Cette collègue a fini par en discuter avec son inspectrice qui en a touché un mot. Suite à cela la situation a connu une nette et durable amélioration.

Un collègue a pu nous dire qu’il ne cherche pas à résoudre ces problèmes, et part du principe que mettre en place des remédiations seraient trop compliqués. Il agit donc en conséquence du refus et adapte son activité à une pratique individuelle.

Des collègues de l’ETLV (Enseignement technique en langue vivante), ont également témoigné que la collaboration transdisciplinaire peut être difficile si les objectifs et les points de vues des différentes parties ne sont pas clairement expliqués. Les difficultés de communication ne permettent pas de résoudre efficacement les problèmes rencontrés.

5. Les ressources universitaires

Le guide des Pratiques collaboratives en milieu scolaire de l’université Laval à Québec 3Beaumont C., « Les pratiques collaboratives en milieu scolAire. Cadre de référence pour soutenir la formation », Crires, Université Laval, 2010 https://www.versunecoleinclusive.fr/wp-content/uploads/2018/11/guide_pratiques_collaboratives.pdf, dédie une partie de son analyse aux difficultés liées aux collaborations. Les difficultés de communication sont abordées, et soulignent que si les rôles de membres de l’équipe ne sont pas clairement définis ou compris cela peut entraver le travail d’équipe. Ces incompréhensions peuvent mener à des déception liées à des attentes et créer des conflits interpersonnels.

Notre travail de recherche nous a amené à découvrir plusieurs articles sur cairn traitant de notre sujet. Nous citerons ci-dessous des passages qui nous ont semblé pertinents dans notre réflexion.

Au cœur des politiques et des réformes éducatives actuelles, il y a une forte injonction à la collaboration ou au travail collectif. Plusieurs autorités scolaires ont fait un appel pressant au dépassement de l’individualisme dominant au profit d’une responsabilisation collective des enseignants par rapport à l’enseignement et à l’apprentissage des élèves. (…) La collaboration entre les enseignants est de plus en plus perçue comme un mécanisme indispensable pour améliorer la pratique pédagogique. Depuis les années 1990, elle fait partie des mesures privilégiées par les législateurs pour réformer l’organisation des systèmes scolaires et la pratique pédagogique. 4LESSARS.C, CANISIUS KAMANZI P, LAROCHELLE M, « De quelques facteurs facilitant l’intensification de la collaboration au travail parmi les enseignants : le cas des enseignants canadiens », Education et Société, n°23, 2009.

 Pour Gather Thurler,  la collaboration entre enseignants est fortement influencée par le mode de relations caractérisant une école : “Le mode dominant de relations professionnelles agit sur le sentiment d’appartenance à une communauté ou au contraire de solitude, de solidarité ou chacun pour soi. Ces sentiments influencent le degré de sécurité, de prise de risque, d’auto-évaluation et d’autocritique de chacun, sa capacité de repenser lucidement sa pratique ou d’assumer les moments de déprime ou de ‘burn out’. Le mode dominant de relations professionnelles détermine en partie la capacité de traiter les nouvelles idées à l’échelle de l’établissement, de les discuter, affiner, enrichir par un dialogue formel ou informel, donc de favoriser l’appropriation collective à l’échelle locale” 5Gather Thurler Monica, « Relations professionnelles et culture des établissements scolaires : au-delà du culte de l’individualisme ? », Revue française de pédagogie, volume 109, 1994. pp. 19-39.

“En tant que chefs, les directeurs doivent avoir les capacités de faire fructifier les connaissances et habiletés des enseignants et de développer une communauté de professionnels dont le sentiment de compétence est renforcé par la collaboration et l’exercice collectif du pouvoir. En ce sens, la collaboration devient un acte de pouvoir.” 6TILMAN Francis, OUALI Nouria, Piloter un établissement scolaire, Bruxelles, De Boeck, 2001.

“Les enseignants ont besoin d’être formés sur l’intérêt et la manière de collaborer entre eux pour améliorer leurs modes de transmission des savoirs, d’évaluation et de formation des élèves. Ce processus de formation continue est qualifié de “professionnalisation des enseignants” et consiste à former des praticiens réflexifs ou des enseignants experts” 7PETITPIERRE C., « Pour une régulation formative du changement », in Demailly L. dir. Évaluer les politiques éducatives : sens, enjeux, pratiques, Bruxelles, De Boeck, 2001.

“Ce qui est vrai pour l’intérieur des classes l’est également des relations entre professionnels, au sein d’un établissement, dont le fonctionnement est plutôt caractérisé par le cloisonnement et le manque de liens de coopération. L’organisation scolaire ne favorise guère les collectifs, malgré les textes officiels qui prônent le travail en équipes, malgré les études qui montrent le rôle déterminant des équipes dans le climat d’un établissement et la prévention de la violence”. 8YELNIK Catherine, « Souffrances professionnelles dans le monde scolaire », Cliopsy, 2010/1 (N° 3), p. 7-17.

Lorsque plusieurs acteurs tentent d’agir dans la concertation, les obstacles sont nombreux. Il leur faut beaucoup d’énergie, de détermination et de confiance dans les bénéfices qu’ils en retireront pour parvenir à mettre en place et à faire vivre des équipes, des groupes de travail 5 (…) Dans un établissement, le manque de communication et de coopération produit des divisions, des incohérences et des contradictions entre les adultes, notamment sur les questions de discipline, qui entament leur crédibilité aux yeux des élèves et la confiance qu’ils leur accordent. Ceux-ci ressentent ces failles dans l’encadrement, ils en jouent, ce qui aboutit à accroître les tensions, à atteindre le moral des équipes et à affaiblir encore le cadre. (…) La conflictualité, inévitable dans les relations pédagogiques et dans une collectivité de travail, si elle n’est pas régulée, laisse libre cours à la destructivité. L’insécurité ressentie par les élèves aussi bien que par les professionnels altère les relations. Un établissement entier peut ainsi être en souffrance” 9KAËS R., « Souffrance et psychopathologie des liens institués. Une introduction », in Kaës R., Pinel J.-P. et al., Souffrance et psychopathologie des liens institutionnels, Dunod, 1996, p. 2-50.

« l’individualisme hypermoderne, récusant la précession du collectif, participe à attaquer les liens et à défaire les espaces destinés à soutenir la groupalité et à  délégitimiser les instances d’élaboration collective ».  10PINEL, J.-P., « La construction d’un dispositif d’intervention à l’épreuve des mutations institutionnelles contemporaines », Dans O. Nicolle et R. Kaës, L’institution en héritage, mythes de fondation, transmission, transformations, Paris, Dunod, 2007, p. 11-24.

6. Pistes de résolution de la situation

En se penchant sur les pistes de résolutions du conflit, nous remarquons qu’il n’est pas forcément évident de régler ce genre de problème. Devons nous choisir la facilité? Ou nous impliquer bien plus qu’il n’était nécessaire au départ pour faire pencher la balance de notre côté ?

Solution de facilité

“Pourquoi faire compliquer quand on peut faire simple”, cet adage nous fait remarquer qu’il n’est pas utile de chercher la difficulté quand la facilité nous permet de régler le problème. Mais règle-t-on vraiment le problème ?

Ce qui parait simple ici dépendra de la vision de chacun. Selon nous, l’abandon, la confrontation devant ses pairs, demander l’intervention du professeur principal de la classe mise en commun sont des actions qui n’impliquent pas de hauts responsables et qui peuvent laisser la situation dans une sphère assez restreinte.

L’abandon

L’une des solutions de facilité est d’abandonner toute coopération et tout projet avec ce collègue. Nous avancerons dans notre progression initiale et laisserons les élèves créer des liens par eux-même entre les deux enseignements mais est ce bien raisonnable ? À court terme, nous évitons ainsi une charge de travail supplémentaire et tout contact avec un professeur insouciant de l’impact bénéfique de cette coopération sur ses élèves. Sur le long terme, il s’avère que ces élèves ne s’apercevront peut-être pas de la complémentarité des deux enseignements et nous retrouverons les problèmes cités dans la partie 2 (Conséquences Probable).

Faire le travail et l’envoyer aux collègues

Créer le projet de A à Z semble être une solution à ce défaut de coopération. Cela dit, c’est une charge de travail très importante surtout pour un stagiaire qui, en plus de ses cours à préparer, doit suivre une formation en continu à l’INSPE. On comprend bien que sur le long terme cette solution s’avère épuisante et inefficace. Sur le court terme, on peut s’attendre à une remise en question de l’enseignant concerné qui pourra faire un effort de son côté et commencera à s’investir dans le projet.

  Confronter l’enseignant devant des collègues

La salle des professeurs est un espace d’échange. On peut donc utiliser le rôle de cette salle pour confronter l’enseignant réfractaire devant des collègues. Ce qui pourrait le mener à coopérer à cause de la pression induite par la vision de ses pairs. Ce qui peut apparaître comme sournois, évidemment, et créer une certaine irritation à l’égard du professeur stagiaire. Il faut comprendre que cela dépend aussi du caractère du professeur réfractaire. S’il est obstiné, il n’hésitera pas à refuser une fois encore.

Cette méthode est à double tranchant : soit le professeur prend l’acte pour une humiliation et là c’est le point de non retour soit il a une prise de conscience et vous pourrez effectuer le projet.

Intervention du Professeur Principal de la classe

L’une des missions du professeur principal est la coordination des enseignants afin qu’il puisse agir dans notre sens. De cette manière, on évite une autre confrontation avec le collègue réfractaire. Il peut être intéressant de faire intervenir le professeur principal qui peut trouver les bons termes pour faire adhérer le collègue et donc servir de médiateur.

Démarches avancées

On peut impliquer l’administration pour ce problème. Ceci demandera beaucoup de temps et d’énergie. Et sûrement des documents à envoyer et à compléter.

Intervention du Proviseur/ Proviseur adjoint

Parmi les pistes de résolution trouvées, l’intervention du chef d’établissement peut permettre une résolution du problème de manière formelle. Le chef d’établissement a pour rôle de maintenir la cohésion dans son établissement, la coordination des équipes et dans les équipes. Ainsi le faire intervenir permettra d’organiser des rendez vous pour établir une discussion saine et construite. L’enseignant peut ne pas vouloir de coopération malgré tout.

Saisie d’un médiateur de l’Éducation Nationale

Le médiateur est une instance qui peut être sollicitée en cas de désaccord avec une décision ou de conflit avec un membre de l’administration ou de l’équipe pédagogique. Il recherche des solutions pour régler ces litiges. Cette démarche doit se faire en dernier recours lorsqu’aucune solution n’a été trouvée. Les démarches sont rapides et faciles à faire. On peut très bien supposé que cela fonctionne mais dégrade la relation entre vous et le professeur concerné. Bien évidemment, rien n’est évident et votre relation avec vos collègues peut aussi rester très saine.

Piste de résolution liée à l’institution

Afin d’éviter cette situation, plusieurs pistes pourraient être mise en place:

  • Tout d’abord, à l’échelle nationale, l’institution améliore la qualité de formation des enseignants stagiaires avec les réformes de la formation INSPE, mais peut être qu’il faudrait travailler sur des formations ou des réactualisations pour les enseignants en poste. Peut être que des séances courtes obligatoires à intervalle réguliers ou des formations plus longues à plusieurs moments de la carrière remettant en question les pratiques des enseignants et bousculent leurs habitudes parfois mauvaises permettraient de changer des états d’esprit ou des façons de travailler.
  • Au sein des établissements, des réunions ou séances d’échange pourraient être imposées sur les emplois du temps pour les équipes pédagogiques de chaque classe. Lors de ces séances, les enseignants pourraient travailler en commun, créer des progressions communes en toute interdisciplinarité et échanger sur ces différentes problématiques de leurs classes.

7. Prendre parti

Au travers de nos lectures nous en arrivons à considérer que le problème de manque de communication est le facteur principal de cette situation. Même si l’activité proposée n’intéressait pas le professeur, une meilleure communication aurait permis des remédiations.

Le manque de communication peut être dû au manque de cohésion au sein de l’équipe et aussi à des habitudes de travail où la collaboration n’est pas évidente.

Grâce à cette expérience et nos recherches, nous nous apercevons qu’une partie des solutions provient de l’équipe pédagogique, mais à travers elle, du chef d’établissement. En effet, son management et ses choix son facteur de cohésion au sein de l’établissement. Le proviseur oriente la politique d’un établissement. La qualité de l’accueil des stagiaires, la création d’événements de cohésion et de réunion de travail ainsi que des orientations générales vers l’échange et la construction de progression groupée doivent être des points essentiels de cette politique. Si cela avait été le cas dans l’établissement où s’est déroulé notre situation, les événements ne se seraient pas passés ou se seraient vite solutionnées.

  • 1
    Bulletin officiel du 25 juillet 2013
  • 2
    Rapport 2016-078, IGEN, Novembre 2016, https://cache.media.education.gouv.fr/file/2016/44/7/2016-078_Recensement_enseignement_professionnel_690447.pdf.
  • 3
    Beaumont C., « Les pratiques collaboratives en milieu scolAire. Cadre de référence pour soutenir la formation », Crires, Université Laval, 2010 https://www.versunecoleinclusive.fr/wp-content/uploads/2018/11/guide_pratiques_collaboratives.pdf
  • 4
    LESSARS.C, CANISIUS KAMANZI P, LAROCHELLE M, « De quelques facteurs facilitant l’intensification de la collaboration au travail parmi les enseignants : le cas des enseignants canadiens », Education et Société, n°23, 2009
  • 5
    Gather Thurler Monica, « Relations professionnelles et culture des établissements scolaires : au-delà du culte de l’individualisme ? », Revue française de pédagogie, volume 109, 1994. pp. 19-39
  • 6
    TILMAN Francis, OUALI Nouria, Piloter un établissement scolaire, Bruxelles, De Boeck, 2001.
  • 7
    PETITPIERRE C., « Pour une régulation formative du changement », in Demailly L. dir. Évaluer les politiques éducatives : sens, enjeux, pratiques, Bruxelles, De Boeck, 2001.
  • 8
    YELNIK Catherine, « Souffrances professionnelles dans le monde scolaire », Cliopsy, 2010/1 (N° 3), p. 7-17.
  • 9
    KAËS R., « Souffrance et psychopathologie des liens institués. Une introduction », in Kaës R., Pinel J.-P. et al., Souffrance et psychopathologie des liens institutionnels, Dunod, 1996, p. 2-50.
  • 10
    PINEL, J.-P., « La construction d’un dispositif d’intervention à l’épreuve des mutations institutionnelles contemporaines », Dans O. Nicolle et R. Kaës, L’institution en héritage, mythes de fondation, transmission, transformations, Paris, Dunod, 2007, p. 11-24.
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